On voit la scène. Des travaux de remplacement d’une conduite de gaz naturel, d’un segment du réseau de distribution électrique et d’infrastructures de télécommunication ont cours sur un tronçon du centre-ville. Un bélier mécanique se faufile entre voitures et piétons pour accéder à une partie du chantier où un travailleur vient d’actionner un marteau-piqueur. Le bruit est assourdissant, la circulation est dense et les commerces sont à moitié déserts. On prend son mal en patience, malgré le fait que les travaux ont lieu là où, il y a à peine deux mois, du bitume tout neuf a été posé à la suite d’une intervention au réseau d’aqueduc.
Benoit Poirier
Pour éviter ce genre de situation malheureusement trop courante, le Centre d’expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU) a réuni parmi les des meilleurs spécialistes du domaine des réseaux techniques urbains pour concevoir le Guide de réalisation d’un projet de reconstruction de réseaux souterrains en zone résidentielle, que l’organisme désire maintenant expérimenter sur le terrain.
Fruit de deux ans de travail et s’inscrivant dans une optique de développement durable, ce guide vise à amener les intervenants à optimiser la gestion et à mieux coordonner la planification et la conception des projets de reconstruction réalisés en zones résidentielles aménagées. Il cherche aussi à leur faire prendre conscience de l’impact majeur que peuvent avoir ces travaux sur les habitudes et le milieu de vie de nombreux citoyens (impacts visuel et sonore, congestion routière, endommagement de la chaussée ou d’arbres, etc.) et des solutions qui sont à leur portée.
Prenant en compte tous les aspects d’un projet, qu’ils soient d’ordre technique, environnemental, social et économique, on y propose une démarche qui inclut les divers acteurs des réseaux de distribution câblés, des réseaux municipaux et du gaz. Véritable outil de planification et de concertation pour l’ensemble des partenaires d’un projet, on y présente les différentes étapes, de ses prémisses jusqu’à sa livraison, les pratiques optimales, un cheminement type, un modèle d’échéancier ainsi que les éléments à considérer pour un plan de communication efficace.
L’objectif du CERIU est de proposer un processus de réalisation et de coordination de projets apte à réduire le nombre, la durée et le coût des interventions, tout en accroissant la qualité de vie des citoyens et des usagers et tout en faisant la promotion d’une utilisation responsable des ressources et du territoire.
Actuellement, dans la plupart des municipalités, on a d’une part les réseaux municipaux (qu’on appelle les réseaux d’eau) et d’autre part les réseaux techniques urbains (qui sont les services de télécommunication et d’énergie), explique Alain Caissy, ingénieur, chargé de projet au CERIU. « Chacun gère sa partie de réseau. Notre objectif est d’arriver à coordonner tous les acteurs. »
L’ouvrage, qui se veut un guide et non une norme, est accompagné d’un second document intitulé Convention de reconstruction des réseaux souterrains en zone résidentielle. Celui-ci permet de fixer légalement les conditions de réalisation d’un projet ainsi que le partage des responsabilités.
De la théorie à la pratique
Les municipalités sont invitées à soumettre un projet pour lequel elles adopteront la démarche proposée par le CERIU et qui permettra à celui-ci de valider et de peaufiner le Guide et la Convention.
« Là, ce qu’on essaie de faire, indique Alain Caissy, c’est de trouver un projet pilote qui nous permettra de tester la démarche proposée. C’est-à-dire de faire un arrimage lors de la planification et la coordination des travaux pour que lorsqu’un intervenant a à faire des travaux à un endroit, que tous les intervenants qui ont à faire des travaux à ce même endroit soient avisés et qu’ils regardent s’il y a intérêt à mettre à niveau d’autres infrastructures. Le cas échéant, on entre dans un processus d’entente où les intervenants vont accepter d’agir ensemble, vont coordonner leur projet et vont partager les coûts. »
« Le Guide, poursuit-il, a été fait par des gens d’expérience. Maintenant, ce que l’on voudrait, c’est pouvoir le mettre à l’épreuve. Avec le soutien du CERIU et du chargé de projet, d’avoir un projet de reconstruction, pas nécessairement en zone résidentielle et qui n’implique pas nécessairement tous les réseaux. Mais vraiment d’être capable de faire interagir différents intervenants. Est-ce toujours réalisable ? Il y a plein de facteurs qui peuvent complexifier une situation. Voilà. On veut le tester. »
On s’attend à ce que le ou les projets pilotes aient une durée de deux ans. Les projets doivent être embryonnaires, à l’étape de la planification. Cela s’applique surtout aux municipalités de 20 000 habitants et plus et qui peuvent se retrouver face à ce type de problématique.