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Allocution de Serge Pourreaux, initiateur et gouverneur du CERIU

 

On m'a extirpé de ma tanière pour venir vous narrer la fécondation, in vitro, du CERIU, il y a plus d'un quart de siècle.

Non..., ce n'est pas une erreur. La gestation du CERIU a, en effet, duré plus de cinq ans. Comme tout bon grand-papa, je commence mon histoire...

Il était une fois, en 1988, une administration municipale montréalaise, surnommée Doré-Fainstat et nouvellement élue, décidant de réformer et de moderniser l'appareil administratif en mettant l'emphase, notamment, sur les activités de planification, de recherche et de développement et d'ouverture sur le monde. Il en a résulté la création d'une nouvelle direction au Service des travaux publics, dont j'ai été nommé responsable.

En ces temps immémoriaux, le Service des travaux publics avait un budget de fonctionnement de plus de 300 millions, un budget d'investissement de 500 millions et comptait plus de 120 ingénieurs.

Pour ma Direction, cela a signifié la mise en place d'un réseau d'échanges technologiques, à la participation à plus d'une centaine d'événements (Colloques, Congrès, etc.) ou de missions, autant au Québec, au Canada qu'à l'étranger et ce, à chaque année. Les retombées de ces activités furent de nous permettre d'optimiser nos activités de plusieurs millions de $ annuellement et ce, rapidement. 

En parallèle, de nombreux Protocoles d'entente et de collaboration furent signés visant la recherche et le développement dans les activités de rayonnement des travaux publics. Citons ceux avec l'Institut de recherche en construction du CNRC, l'Institut national de la recherche scientifique, Polytechnique, McGill, l'Université de Sherbrooke (Béton), l'Université Laval, l'École de technologie supérieure, l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon, les Entretiens Jacques-Cartier, le Laboratoire central des Ponts et Chaussées (Centre Nantes), l'Institut national de génie urbain de Lyon, etc.

Que de foisonnements d'idées et de projets cela a provoqués. Une belle époque de ma carrière! Merci à feu Nabil Asswad, à Yves Girard, à André Lachapelle, à Pierre Dubé, à Jean Lewis et à M. René Morency, mon patron, qui m'a toujours donné carte blanche!

Notre succès à ces égards a eu, cependant, des effets surprenants! Notre direction était devenue un carrefour technologique improvisé! En effet, tous les fabricants de nouveaux matériaux, d'utilisateurs de nouveaux équipements et de nouvelles technologies voulaient les tester chez nous et se servaient de nous comme référence à travers le Québec et le Canada! Cela se soldait par des dizaines d'appels et de demandes de rencontres de la part de municipalités et de certains organismes impliqués dans le domaine à chaque mois!

D'autre part, l'effort de planification entrepris par la ville de Montréal a amené à l'identification, entre autres, des besoins d'investissement à long terme sur le territoire et les équipements de la Ville. Cela a résulté au projet et document : Bâtir Montréal.

À cet effet, ma Direction a préparé un document intitulé Horizon 2000. Ce document de fin 1988, établissait les besoins en investissement dans les infrastructures sous la responsabilité des travaux publics à plus de deux milliards de dollars pour leurs mises aux normes. Notre effort d'évaluation des besoins s'est rapidement coordonné à celui de la Fédération canadienne des municipalités qui faisait le même exercice au niveau pancanadien, l'évaluant à 15 milliards de dollars.

Notre réflexion stratégique, à la ville de Montréal, s'est traduite en deux constats clairs:

•    L'enjeu de la mise aux normes des infrastructures urbaines est un enjeu budgétaire et financier, mais aussi d'optimisation des procédés, des matériaux et des technologies, car les disponibilités financières ne rencontreront jamais la valeur des besoins d'investissement selon les pratiques d'entretien, de reconstruction et de réhabilitation, en vigueur à cette époque.

•    Ce n'est pas le rôle et la mission d'une ville, peu importe sa taille, d'être le catalyseur et le centre névralgique d'échanges technologiques entre les donneurs d'ouvrage, les fournisseurs de matériaux et de technologies, les organismes de recherche et de développement et les instituts de réglementation et de certification.

Si vous m'avez suivi au cours des trois dernières minutes, vous devinez certainement la suite des événements même si cela s'est produit avant l'arrivée d'Internet..... Ce n'est certes pas un suspense à la Stephen King...Oui, oui, oui...

Un Colloque a été organisé en mai 1991, son titre «La réhabilitation des infrastructures urbaines: un partenariat technologique?» Pour concrétiser le consensus établi lors de ce colloque, soit le besoin d'un centre de transfert technologique en matière d'infrastructures urbaines, deux comités de suivi, représentatifs des milieux du génie urbain, étaient formés. Le premier confectionnait un devis pour faire effectuer une étude de faisabilité d'un tel Centre. Le second réunissait le financement de l'étude: 33 entreprises et organismes privés et 10 organismes publics y participèrent, incluant la ville de Montréal.

Après la réalisation de l'Étude de faisabilité, le développement d'un plan d'affaires, une multitude de démarches de financement et l'obtention de subventions de démarrage, le CERIU était inauguré le 1er avril 1994. Rappelons l'équipe de démarrage: Joseph Loiacono, Marie-Élaine Desbiens, Jean-Paul Collinge, Claude Vincent, Jean-Martin Croteau, Patrice Rufiange, Philippe Boursier, Martine Pilote, Jean-Daniel Tremblay, M. Claude-F. Lefebvre comme président du Conseil d'administration et votre serviteur comme président du Comité exécutif et directeur général par intérim. Que de beaux souvenirs...

Le CERIU, on l'a dit et répété, est un organisme unique au monde. Seul centre coopératif et intégrateur à se consacrer entièrement et exclusivement aux infrastructures urbaines. Le CERIU peut également se vanter de compter sur un réseau national et international de collaborateurs-experts provenant de tous les secteurs et de tous les milieux. Coopérative au regard panoramique mais dont les pieds sont solidement ancrés sur le terrain, le CERIU fait l'envie de biens des acteurs canadiens et étrangers. Pourquoi au Québec ? Peut-être étions-nous plus visionnaires, ou simplement un peu plus fous...Quoi qu'il en soit, la mission du CERIU...  

Mettre en œuvre toute action de sensibilisation, de formation, de diffusion des connaissances et de recherche appliquée pouvant favoriser le développement du savoir-faire, des techniques, des normes et des politiques supportant la réhabilitation durable et économique des infrastructures urbaines et la compétitivité des entreprises qui œuvrent dans le secteur. Fait l'unanimité et cerne parfaitement les enjeux auxquels sont confrontés les divers intervenants du domaine des infrastructures urbaines. Elle dénote bien, également, le caractère intégrateur, à la fois éducatif et pratique, mais toujours innovateur nécessaire à la bonne santé du milieu.

Mais pourquoi encore parler de la mission? Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, la mission n'est pas un vœu pieux, ni un simple slogan accrocheur. La mission définit la nature de l'organisation, sa raison d'être. La mission est un phare: elle permet de garder le cap même lorsqu'on est enterré sous des piles de paperasse, occupé à éteindre des feux ou à répondre aux demandes pressantes des clients qui attendent au bout du fil. Pris dans le tourbillon du quotidien, il est facile de perdre de vue pour quoi, et pour qui, on déploie tous ces efforts. Le phare n'est pas une fin en soi. On peut très bien garder les yeux fixés sur lui et faire du surplace. Les objectifs permettent de tracer un chemin, de donner un itinéraire, bref, de baliser son avancement. Le CERIU s'est fixé 4 objectifs dès le départ. Depuis sa création en 1994, il n'a eu cesse de travailler à leur atteinte. Permettez-moi de vous les présenter rapidement.

•    Favoriser une mobilisation québécoise et nationale axée sur la problématique des infrastructures urbaines par des initiatives de sensibilisation, d'information, de transfert technologique et de concertation;
•    Initier et coordonner de nombreux projets mobilisateurs d'expérimentation de nouvelles technologies dans les travaux d'infrastructures des villes québécoises et canadiennes;
•    Stimuler la recherche dans les secteurs stratégiques pour améliorer la qualité et la gestion des infrastructures;
•    Encourager la création de partenariats dynamiques formés de représentants de l'industrie, des centres de recherche privés ou publics et des donneurs d'ouvrage.

Pour conclure, je ne peux qu'agir que tel un parent, qui voit sa progéniture atteindre 20 ou 25 ans, se l'imaginer encore au berceau et craindre pour sa santé et son avenir. La fibre paternaliste est trop forte. La pertinence du CERIU n'est plus à démontrer. Sa portée ne fait plus de doute. Que ce soit en 1991 ou en 2014, les enjeux technologiques liés aux infrastructures urbaines sont aussi importants que les enjeux du financement des travaux. Ils s'influencent et représentent des centaines de millions de dollars annuellement pour les citoyens du Québec. La mobilisation de tous les acteurs du domaine par le CERIU est de la plus haute importance car un déficit d'entretien actuel d'environ trente milliards de dollars au niveau des infrastructures est un véritable enjeu de société.

Le CERIU n'existe pas pour lui-même. Il travaille pour les acteurs du milieu, pour la pérennité du patrimoine urbain et pour le bien-être des citoyens. J'interpelle tous les gens, toutes les autorités qui ont contribué à fonder le CERIU et à lancer ce mouvement coopératif, à demeurer actifs et mentors de la génération actuelle pour en assurer son succès futur. Nous devons travailler pour l'avenir...

Qui n'a pas les moyens de son avenir? Merci et bonne soirée!

                             

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